A l’occasion de la soirée organisée fin mai par la CDAF (Compagnie des dirigeants et acheteurs de France) sur le thème de l’efficience et de l’innovation de la fonction achats à travers ses outils, une poignée d’éditeurs et d’entreprises utilisatrices ont fait un point sur le marché. Entre conseils et doléances, chacun a pu partager son expérience et échanger avec les autres, devant un auditoire impressionnant.
Plus de 500 décideurs achats, DAF et DSI avaient coché la date dans leur agenda. Jeudi 21 mai au soir, c’est donc devant une salle comble que six éditeurs et prestataires e-achats (BravoSolution, Coupa, Ivalua, MyProcurement, SAP-Ariba, SynerTrade) ont pu exposer leur vision de l’offre et des projets, en préambule de la présentation d’un Livre blanc consacré aux systèmes d’information de la fonction. Avant eux, les décideurs achats de quatre entreprises utilisatrices, que certains auront jugées trop grandes et exemplaires pour représenter le marché, avaient planté le décor en présentant leur chantier d’informatisation et les vertus des outils.
« Nous sommes passés d’une gestion amatrice à une gestion professionnelle », a tranché d’emblée Arnaud Minvielle, directeur général du GIE en charge des achats au sein du groupe BPCE, soutenu dans son analyse par Claude Bordier, chargé de mission SI achats à la RATP : « Les outils rendent la vie de l’acheteur plus simple, en facilitant notamment la transversalité amont et aval ».
Ils permettent « la standardisation et la simplification des processus », a renchéri Michel Jullien, vice president, procurement financial control & administration chez Sanofi, citant également l’enjeu de conformité et de gestion du risque. Pour Jean-Pierre Vignes, directeur des achats non marchands chez Carrefour, la mise en place d’outils répond d’abord à un enjeu d’efficacité, pour ne pas dire de productivité, dans le but d’« augmenter le volume négocié par collaborateur ».
Questionné ensuite sur les conditions de réussite du projet, Claude Bordier a souligné « l’importance de créer un schéma directeur, pour favoriser le dialogue entre les achats, la DAF, la DSI et la direction générale, et imposer des points réguliers au cours du projet ». Mais aussi de soigner l’avant-projet pour faire remonter les attentes et justifier le chantier, pour évaluer les coûts et commencer à orienter les choix. Un point de vue partagé par Michel Jullien, pour qui cette étape préliminaire est cruciale, tant elle favorise l’adhésion future des équipes. Pour être à l’écoute du terrain et mieux répondre aux attentes, BPCE a prolongé sa démarche en créant un club utilisateurs interne ainsi qu’un baromètre de satisfaction métier, dont dix des cinquante questions portent sur le système d’information.
En ce qui concerne l’outil lui-même, une unanimité s’est dégagée sur l’intérêt de limiter autant que possible les développements et les adaptations aux spécificités de l’entreprise. « Il faut oser tordre l’organisation pour rentrer au maximum dans le standard », a conseillé Jean-Pierre Vignes.
Les quatre responsables achats ont conclu leur intervention en égrenant les principaux critères de choix d’une solution e-achats, en commençant sans surprise par la qualité de la réponse fonctionnelle et l’ergonomie. « La capacité d’écoute et de compréhension du besoin par l’éditeur, la pérennité de la solution, le support en mode projet et en production sont également importants », a complété Michel Jullien. Sans oublier la question du financement, pointée par le décideur achats chez Carrefour, ou encore « la possibilité de tester l’outil sur un périmètre étendu ».
L’élaboration d’un POC (Proof of concept), c’est-à-dire d’une maquette ou d’un prototype en amont du choix de la solution, a d’ailleurs fait l’objet d’un vif débat lors de la table ronde qui a suivi, entre les six éditeurs et prestataires e-achats. « Le POC devient un travers », a martelé Franck Le Tendre, directeur Europe de l’ouest de SynerTrade. De préciser sa pensée :
« Certaines entreprises cherchent à faire le projet avant le projet. Or, le POC ne doit pas servir à bâtir le business case mais à le valider ! ».
Car tous les éditeurs en ont convenu : ce travail à un coût, qu’il leur est de plus en plus difficile de supporter. D’où la question posée en filigrane de savoir s’il faut intégrer le POC dans la phase de sélection ou une fois la solution choisie. Selon que l’on est éditeur ou utilisateur, que l’outil est proposé en mode hébergé ou en licence, que le projet porte sur une fonctionnalité précise ou couvre une partie étendue du processus achats, les réponses divergent. Les stratégies des éditeurs aussi. Au final, le débat ne semble pas près d’être tranché.